Lutter contre l'oubli

Ce blog photographique est né avec le kidnapping de Florence Aubenas en Irak en 2005. Une photo du jour pour tenter d'éviter l’oubli, une photo sur le thème de la détention ou de l’éphémère comme aurait dû être brèves les détentions de Florence, Hussein, Giuliana, Marie-Jeanne, Sorin ou Eduard. J'ai continué en 2006 pour ne pas oublier Ingrid Betancourt. J'ai poursuivi en 2009 pour partager une remarque ou quelques petites choses qui me plaisent bien.

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Lieu : Soissons, Picardie, France

Auteur-photographe, parfois aussi un peu graphiste, passionné de chevaux, d'autos et de course à pied.

mardi 2 juin 2009

Abîmé ou crashé ? ... Je fais mon métier !

Un coup de gueule ce matin.
Le lundi 1er juin, une catastrophe majeure a endeuillé l'aviation civile française. Bon nombre de médias ont employé le terme de "crash", pourtant totalement injustifié. Un "crash", c'est un atterrissage de fortune, effectué train rentré. Par extension, ce terme est employé quand un avion s'écrase au sol. Mais en mer? Difficile de s'écraser ! Le vocable "abîmé" serait donc nettement plus approprié puisque l'avion a disparu en mer.
Ce n'est pourtant pas cette précision de vocabulaire qui m'a le plus marqué dans cette affaire : c'est le comportement des médias. Ils ont investi en masse l'aéroport de Roissy. A 16h30, j'ai compté 18 véhicules de transmission satellitaire. En soit, ça me paraît déjà énorme, même si la catastrophe est sans précédent dans l'histoire de l'aviation française.

Ici à l'aéroport CDG 2D :

Ici à l'aéroport CDG 2F :

Un policier m'a avoué que depuis le matin, ils (la police) ne savaient plus contenir des journalistes "particulièrement charognards". J'ai personnellement assisté dans le terminal 2G à une équipe de journalistes qui souhaitait à tout prix interviewer des gens qui revenaient d'un vol international autour de la question : "Etes-vous au courant de la catastrophe? Est-ce que cela vous fait peur? Allez vous continuer à prendre l'avion?" ... Ahurissant, non, comme question?
Tout comme cette information diffusée à 18h40 sur le site du journal 20 Minutes : "A la buvette située en face de la porte d'arrivée du vol de Rio, des serveurs témoignent avoir vu un couple de «jeunes gens âgés de 17 à 20 ans en pleurs»." Je vais peut-être paraître très critique, mais c'est de l'information ce genre de phrase ?

A 19h10, un colis suspect a entraîné au terminal 2G l'arrêt immédiat des transferts, tant routiers que piétons, avec l'évacuation des équipes journalistiques qui se préparaient avant le journal de 20h00. Une équipe a tout de même souhaité enregistrer sur fond de déploiement policier mais un problème électrique a empêché le tournage. Le responsable de l'équipe a lourdement insisté pour tout de même se rendre à son générateur qui se trouvait dans le périmètre évacué. Les policiers de faction l'en ont empêché. "Mais, je fais mon métier!" leur a t'il répondu. Je trouve ça peu intelligent comme réponse, car même si le colis suspect n'était pas piégé, on ne l'a su qu'une fois que les forces de sécurité l'avaient fait explosé. Pas avant. Et qu'en l'occurrence, vouloir pénétrer un périmètre de sécurité me semble assez stupide.
Certes, il faut informer. Mais là, où est le respect de la douleur des familles des victimes ?
Et puis, pour conclure dans la bêtise, cette réaction des marchés financiers : l'action BNP Paribas baissait de 2,28% lundi après-midi à la Bourse parisienne, tout ça parce que des rumeurs, pourtant démenties par une porte-parole de la banque, évoquaient la présence de dirigeants de la banque dans l'avion d'Air France disparu au-dessus de l'Atlantique. Visiblement les banques continuent de fonctionner sur des rumeurs. Cela promet pour sortir de la crise !

Caméraman de France 24 dans l'attente de la fin de l'alerte au colis suspect. A l'écran, les policiers qui interdissent le passage :


Je remarque aussi qu’à vouloir diffuser une info le plus rapidement possible, elle est souvent erronée. Le site de l’Expansion parle à 17h32 d’un Suisse disparu, 73 français et cite 24 nationalités. De son côté le journal suisse Le Matin parle à 20h33 de 4 Suisses disparus, tandis que Continental News parle à 21h38 de 6 Suisses, 61 Français et 32 nationalités.
Pourquoi ces variations (puisque le nombre de morts ne varie pas) ? Un directeur d'Air France a expliqué que différents décomptes ont pu être établis en raison de plusieurs cas de passagers dont la double nationalité a dû être vérifiée. Sûrement juste, mais les médias, et eux en premier lieu, devraient éviter de se précipiter en annonçant des bilans quand rien n’est certain !